Par Yves St-Jean

La Chronique d'hier à aujourd'hui

 

 

1969

La Chevrolet Camaro Z28 de Todco Racing piloté par Craig Fisher

La Pontiac Firebird de Jerry Titus

Richard au volant de la Pontiac Firebird

Richard à Bryar, New Hampshire

À Watkins Glen

1970

Les Mustang de Bud Moore Racing

La Javelin Penske de Donohue

L'une des Chevrolet Camaro

La Plymouth Barracuda AAR

La Dodge Challenger

La nouvelle Pontiac de Todco Racing

La Chevrolet Camaro de Mo Carter

Le fameux Cobra CSX2002 de Jean Ouellet

La Chevrolet Camaro de Richard aux couleurs Export "A"

La Chevrolet Camaro Export "A" lors d'une course régionale

 

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1969: Brown impressionne en Trans-Am

Suite au travail de développement de la Firebird en 1968, Craig Fisher est persuadé de conduire une des nouvelles Firebird construites par Titus-Godsall. L'équipe construit six voitures financées par Godsall soit deux voitures d'usine, un mulet, une voiture en location à la demande de compétiteurs locaux de chaque événement, et deux autres vendues au HOL ARC Racing Team. Malheureusement, Jerry Titus n'est pas intéressé par les services de Fisher même si Godsall est son associé. C'est alors que Mc Connell Todco Racing vient en aide à Fisher en construisant deux voitures neuves, une pour Dereck Johnson et l'autre pour lui. Pendant ce temps, Richard se prépare pour son entrée professionnelle en Trans-Am. Pour sa première sortie au Michigan, la voiture qui a gardé les couleurs de Godsall de l'an passé, affiche maintenant le numéro 62, Richard excelle et il y va même d'une quatrième place à la mi-course et les professionnels le trouvent très combatif. L'équipe et lui s'adaptent bien, les résultats sont moyens, il figure bien en qualification mais des bris mécaniques l’empêchent souvent de finir les courses. Il obtient son meilleur résultat à Bryar Park avec une sixième place. Cette course est la dernière avant Mont-Tremblant.

Mont-Tremblant est la course la plus importante pour le team Gagnon parce que pour celui-ci la commandite vise directement le marché local. Todco et Gagnon sont les plus grosses équipes régulières de chez-nous. Cet événement amène beaucoup de couvertures de presse lors des semaines précédant cette course.

Jerry Titus et son équipe ont loué du temps de piste au circuit Mont-Tremblant le mercredi avant la course du 3 août. Malheureusement son camion, transportant voitures et équipement, n'arrivera pas avant le jeudi. C'est à ce moment-là que la proche relation entre M. Gagnon et M. Godsall entre en jeu. L'équipe Titus emprunte l'équipe de Richard afin qu'il puisse faire des essais privés. Tout le monde est en place et Titus commence à tourner et peu de temps après la voiture ne repasse plus. Après l’arrêt de la session, elle revient complètement détruite sur une plate-forme. Heureusement, Titus n'est pas blessé. On transporte la voiture de Richard, à l'atelier de Montréal, on met une toile dessus en sachant très bien qu'il sera impossible de la reconstruire. Les journalistes des revues sportives spécialisées ont écrit des versions différentes pour commenter l'événement. Jerry Titus était un pilote agressif et audacieux. Il avait une réputation qui le précédait. On voulait éviter le sujet et même un de ses mécaniciens allait jusqu’à dire n'avoir jamais entendu parler du crash de cette voiture. On a aussi écrit que l'équipe TG aurait mis la voiture de réserve à la disposition de Richard pour la course. Un supposé « clé en main »; il n'y avait qu'à y ajouter les couleurs de l'équipe selon les journalistes.

Qui de mieux placé que Richard Brown pour nous raconter ce qui c'est vraiment passé? On est à 24 heures des premiers essais officiels du vendredi matin et toutes les équipes sont rentrées au circuit. Très tôt jeudi matin, un représentant de l'écurie TG nous donne rendez-vous à un entrepôt de Montréal. Robert Gagnon, Richard et les équipiers arrivent sur place, avec le camion et la remorque, et découvrent un atelier complet concernant la fabrication et développement de l'équipe. En début de saison, l'équipe TG avait déménagé leur base de Tarzana, Californie et s'était installée à Lake Orion au Michigan, par la suite au New-Jersey et Terry Godsall a convaincu l'équipe de s'installer à Montréal. Parmi l’équipement se trouvait une des six Firebird construites par Titus, c’était celle offerte en location par l’équipe, elle avait déjà servi à la première course de l’année, au Michigan; conduite par Guillermo Ortega, elle avait par la suite été repeinte de couleur orange pour un autre compétiteur mais celui-ci n’avait finalement pas conclu ce « deal ». Richard m’a dit qu’il avait eu entente pour l’achat mais pas un remplacement de la voiture. Après le transport de la Firebird, à l’atelier de Gagnon Springs, on s’est affairé pour transférer le moteur et la transmission de la voiture accidentée sur la nouvelle Firebird car elle était sans mécanique, c'est-à-dire « roller ».

Pendant que l’on travaillait à remettre la nouvelle Firebird en piste, Richard se rendait au circuit Mont-Tremblant afin de faire quelques essais au volant de la voiture de Jerry Titus. Suite aux événements du mercredi, l’équipe TG avait invité Richard à participer aux essais avec eux. Richard était au volant d’une voiture d’usine et m’a révélé qu’il n’avait jamais conduit une voiture aussi bien préparée et équilibré. Suite à ses performances, il s’est fait remarquer par plusieurs chefs d’équipes. Même Jerry Titus a déclaré, dans le journal La Gazette du 1er août 1969, « J’ai été très impressionné par sa conduite aux essais, je l’ai aussi observé en course et il sait très bien maîtriser un volant. »

Dick aurait bien aimé conduire la deuxième voiture de l’équipe, il aurait sûrement bien performé mais hélas la tâche revenait à Gordon Johncock, un pilote de la série Indy. La voiture de l’équipe Gagnon était au circuit le vendredi matin, Richard s’est qualifié en milieu de peloton et n’a pu terminer l’épreuve. La semaine suivante on se déplaçait à Watkins Glenn, N.Y., on se qualifiait immédiatement après les équipes de pointe mais, encore là, le manque de préparation donnait les mêmes résultats. Par contre, à cet événement, l’équipe Todco a bien performé atteignant une quatrième et sixième places pour Craig Fisher et Dereck Johnson. La dernière course de l’année pour Richard fut à Kent, Washington. Il qualifiait la voiture deux rangées derrière celle du gagnant de l’épreuve Ronnie Bucknum sur une Camaro de l’équipe Penske. Richard a connu le même sort qu’aux dernières épreuves et la saison s’est terminée plus rapidement que prévue, avec un taux de participations de sept sur douze courses et comme bilan beaucoup de bonnes qualifications, peu de courses terminées et une bonne sixième place. L’équipe avait beaucoup de bonne volonté, mais peu d’expérience et, de plus, les moyens financiers commençaient à manquer.

À l’automne, M. Gagnon convoque Richard au même bureau mais pas pour les mêmes raisons. Il lui annonça qu’il retirait son équipe et sa commandite de la compétition. La conjoncture économique ne lui permettait plus de poursuivre son rêve. Il mettait alors en vente la voiture et tout l’équipement. L’annonce passait dans Autoweek, journal spécialisé pour la course en circuit routier en Amérique du Nord. Dans les années qui suivront, M. Gagnon fermera son entreprise à Montréal et s’installera à Philadelphie. Il deviendra propriétaire d’une des concessions d’International Springs qui deviendra la plus grosse et la plus rentable aux U.S.A. Lorsque Richard vient se reposer en Floride, il partage un repas chez M. Gagnon, à sa maison des Bahamas, pour se remémorer de bons souvenirs.

1970: Une saison Export "A"

Suite au retrait de M. Gagnon, l’année 1970 ne s’annonçait pas très reluisante pour Richard mais selon les médias, la série Trans-Am promettait d’être la plus convoitée autant par les équipes que par les pilotes et surtout par les manufacturiers. En 1970, la mode des voitures de Pony Car est au maximum et tous veulent prendre la plus grande part du marché. Leur slogan « Win on Sunday -Sell on Monday » est au plus fort et ceci oblige une liste d’inscriptions de plus en plus longue et intéressante. On a séparé les voitures de deux litres, en une classe particulière, car les participants sont en trop grand nombre et en voici un aperçu par cette liste provisoire :

Ford avec deux Mustang pour Parnelli Jones et Georges Follmer préparées par Bud Moore. Roger Penske a obtenu un contrat de trois ans avec Américan Motor pour la construction de deux Javelin, l’une pour Mark Donohue, le champion de 1969 et l’autre pour Peter Revson, futur pilote de formule 1 pour McLaren et héritier des produits Revlon. Jim Hall de Chaparral a pris la relève pour Camaro avec le pilote de formule 1 Vic Elford. Chrysler a formé deux équipes : la première se compose de Dan Gurney qui s’occupe des deux Barracuda de l’équipe AAR pour Swede Savage pilote Indy et pour lui-meme. Quant à la deuxième équipe nous y trouvons Sam Posey avec Auto Dynamic de Ray Caldwell qui conduit la Challenger numéro 77, secondé par Ronnie Bucknum sur le numéro 76. L’équipe TG aura une seule Firebird en développement pour Titus. Aux équipes professionnelles s’ajoutent Owen Corning qui a gagné le championnat américain avec des Corvettes et construit deux nouvelles Camaro, le RW Racing a acheté une voiture gagnante de l’équipe Penske, de l’an passé, pour ajouter à sa première voiture. Beaucoup de pilotes de talent ont acheté des voitures d’usine des dernières années. Chez-nous, on a John Todd, avec l’équipe Todco Racing qui a construit une Firebird toute nouvelle pour ajouter à une Camaro déjà existante, et une ex-Firebird de l’écurie TG pour Craig Fisher, Moe Carter et Gordon Dewar font aussi partie de cette liste impressionnante.

Richard reçoit un coup de fil de M. Gagnon lui annonçant que la voiture et l’équipement n’étaient pas vendus. C’est alors que M. Gagnon lui offre de se servir de la voiture et de tout le matériel nécessaire, c’est-à dire camion, remorque et équipement et ceci gratuitement. Il lui fallait trouver les moyens financiers nécessaires de la faire rouler. C’est alors que le pilote allait faire du porte à porte aux industries afin de s’assurer une place au soleil. Il décrochait 10 000$ d’Export A; il faut se rappeler que les compagnies de cigarettes ont toujours été très impliquées et généreuses auprès des courses automobiles.

Cette fois, Richard reçu un appel de Gerry Godsall, qui avait entendu parler, par Robert Gagnon, de sa situation actuelle pour la saison 70. M. Godsall avait beaucoup d’estime pour Richard et aurait probablement aimé l’avoir dans son équipe tout comme Craig Fisher mais dans l’équipe TG, Titus gérait le statut des pilotes. M. Godsall lui offre alors deux de ses moteurs « Bartz » A l’époque le prix de ces moteurs était de 5 000$ chacun, les deux moteurs offerts se trouvaient à l’atelier Smokey Yunick pour un rafraîchissement pré-saison et il en coûtait 1 500$ chacun pour le travail effectué. M. Godsall dit à Richard « Paie les coûts chez Yunick et garde les moteurs pour la saison ». Richard étant parti de zéro, quelques jours auparavant, se retrouvait maintenant avec une voiture d’usine de l’an passé, une remorque, un camion et de l’équipement, deux moteurs de rechange et une somme de 7 000$ sur les 10 000$ de commandite. Il fallait des équipiers pour seconder Richard dans cette nouvelle aventure, c’est alors que Gérald Marin entre en scène.

Gérald est un magicien de la course automobile et il a travaillé, précédemment, avec André Samson en reconstruisant la Cobra de l’écurie Québec. Il avait souvent devancé les pilotes de l’écurie Gagnon en 1968, cette Cobra a une belle histoire en étant la première voiture de course construite par Shelby,la cobra« CSX2002 » qui avait couru à Sebring avec Ken Miles. Elle fut vendue à Comstock Racing de Toronto, revendue à Jean Ouellet de Rimouski, et par la suite, elle se retrouve chez le Dr Ostiguy et de là chez André Samson. Gérald a entrepris sa saison en étudiant les règlements de la Trans-Am de l’année 1970. Il éprouva quelques complications à courir avec la Firebird. La « SCCA » avait établie de nouvelles normes pour les moteurs. Il y avait toujours la réglementation du cinq litres mais devaient posséder les moteurs d’origine afin de promouvoir la marque de la voiture. Les Firebird depuis ‘68 avaient des moteurs 302 de Camaro Z28. Le règlement fut détourné car les Firebird assemblées au Canada auraient eu des propulsions Chevrolet mais en 1970, les Firebird auraient été dotées de moteurs Pontiac.

L’écurie TG et Todco allaient, au cours de l’année, développer ses moteurs pour une utilisation future. En début de saison, on tolérait les moteurs Chevrolet mais par après, il fallait utiliser les originaux. Or, Richard possédait deux moteurs Z28 de rechange, la façon la plus facile et la moins onéreuse était de transformer la Firebird en Camaro. Chose assez simple à l’époque. Il était plus facile de transformer la carrosserie que la mécanique. La voiture arborait les couleurs d’Export A soit vert avec les bordures décoratives de couleur or et, par respect pour les bontés de M. Gagnon, l’auto était inscrite sous le sigle de GSRacing, synonyme de Gagnon Springs.

De son côté, Gérald étudiait les circuits que Richard devait courir au cours de la saison, afin de choisir les bons engrenages de la transmission et les bons ratios de différentiels afin d’exploiter les moteurs Bartz au maximum, c’est-à-dire environ 500 hp. Il fallait donc performer, terminer les courses pour remplir les exigences des commanditaires, courir au Canada et garder un peu de budget pour participer à quelques épreuves de la Trans-Am afin de bien figurer et se faire voir des écuries de pointe. Richard avait une idée bien en tête à ce sujet. Le bilan du championnat canadien a été de quatre victoires et deux fois deuxième places en dix départs. Pour les essais très importants de la Trans-Am ce fut, en premier lieu, à Tremblant. Tout a débuté avec une bonne classification mais un bris mécanique a empêché de terminer. La seconde chance fut à Watkins Glen, NY, malgré un vol d’équipement pour environ 2 000$ avant la course, il réussit quand même à terminer onzième parmi les équipes les plus prestigieuses de la série. Donc, mission accomplie pour les projets futurs. La dernière course de la saison fut le traditionnel Grand Prix de Trois-Rivières et tous les compétiteurs du Canada participant habituellement en Trans-Am étaient au rendez-vous et de la partie pour la coupe du Maire : les Carter, Roy, Guertin, Alain, Barg et Johnson. Richard sortit vainqueur de cette épreuve.

La saison terminée, M. Gagnon reprit son bien et réussit à vendre le tout à des pilotes locaux et Richard se retrouva encore à un point mort de sa carrière.

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